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  • évènement et personnage

    Il faut donc à la fois que la personne apparaisse avec l'évènement, ce qui fait un évènement dans son épaisseur, un évènement vécu. Les évènements s'enchaînent. La vie vit. Ceux qui l'agissent apparaissent.

    Mais: comment peuvent ils avoir une conscience de second rang? C'est à dire, une conscience tout court?

    Il y a des subjectivités, sinon l'adjectif "vécu" n'a aucun sens. Mais on ne se place pas de leur point de vue (qui n'est pas l'important) mais du point de vue de la vie.

  • Bon anniversaire

    Johnny dit :
    Bonjour la poule
    Johnny dit :
    je te fais un bisou en vitesse
    Johnny dit :
    je doit y aller
    Johnny dit :
    comment ça va aujourd'hui?
    Anastasie dit :
    pareil
    Johnny dit :
    es-tu allée à la capoeira finalement?
    Anastasie dit :
    d'ici un semaine ça passera un peu
    Anastasie dit :
    oui mais j'en suis partie
    Johnny dit :
    et comment va ton sommeil?
    Anastasie dit :
    ils étaient tous trop heureux et j'avais une mauvaise énergie
    Anastasie dit :
    J’aurais mal joué et pourri la roda
    Anastasie dit :
    mal le sommeil, je ne m'endors pas
    Anastasie dit :
    mais ça va passer
    Johnny dit :
    et les cauchemars?
    Anastasie dit :
    C’est drôle que tu dises ça
    Johnny dit :
    pourquoi drôle?
    Anastasie dit :
    J'ai rêvé que papa était parti faire une retraite dans la forêt, il allait mal, il était seul, décharné décadent malheureux et condamné, il n'essayait pas de se sauver mais d’aller se cacher pour mourir, un peu, ou trouver quelque chose, un sens, avant de mourir, ou peut-être, avec sa naïveté de la fin, qu’il voulait aller commencer une nouvelle vie là où on l’accepterait, là où il n’y a personne, comme il le disait pour l’Afrique. Je le vois, sa silhouette mais maigre et vouté et les yeux creux, avec se cheveux noirs frisés. Personne ne l’aimait ni ne l’avait vu depuis longtemps. Je le vois mais je n’y suis pas quand il y est, dans mon rêve, c’est rétrospectif, c’est bien avant que je n’y arrive que lui il arrive là bas. J’apprends qu’il y est parti il y a x temps. Je ne sais rien de plus. Je partirai, plus tard, le chercher.
    Anastasie dit :
    Donc j’arrive dans une espèce de maison mêlée d’arbres avec des escaliers, chez une communauté de hippies il semble mais un peu délabrée, y a peut-être plus personne qui vit là, il y a un escalator sous une verrière avec la jungle à travers, je suis dessus, je monte, et là il y a V., il descend, ou pas, je ne sais, il m’attendait, il est chez lui mais il a quelque chose de spécial dans son attitude, il m’attendait, il est en même temps un peu négligé, nonchalant. La situation est exceptionnelle et inattendue pour moi, pas pour lui, il m’attendait, un peu désinvolte et dépassé à l'intérieur mais ne me le montrant surtout pas, ou vraiment blazé.
    Anastasie dit :
    C’était comme un peu tendu entre nous, mal à l'aise, je ne l’ai pas vu depuis longtemps mais je ne suis pas là pour lui, alors ça me met mal à l’aise. Lui il s’y attend, à mon malaise, il surplombe un peu la situation, comprend pourquoi je suis mal à l’aise à son égard, je me sens comme parfois quand j’ai l’impression qu’il me juge. Mais je sais qu’il sait pourquoi je suis là. On ne parle presque pas pendant un moment.
    Anastasie dit :
    Puis je lui demande si papa est mort
    Anastasie dit :
    Ce qui explicite le summum du triste de la situation parce que dans cet endroit sa mort ne peut avoir eu lieu que dans une solitude extrême. Parce qu’il n’a rien à voir avec ses gens. D’ailleurs V. n’est pas touché, il est des gens qui ont vu passer papa comme un étranger, en lui étant indifférents, comme si c’était un zarbi à qui il ne pouvait arriver que ça…
    Anastasie dit :
    alors il me dit non
    Anastasie dit :
    puis oui
    Anastasie dit :
    puis non
    Anastasie dit :
    il est mal à l'aise, il minaude, il me manipule ou s’amuse un peu, ou peut-être ne le sait-il pas, il se venge un peu, je ne sais pas.
    Anastasie dit :
    Alors là j'erre un peu, dans l’endroit moussu et ruinu, je le cherche un peu, j’oscille entre fatalisme et timide espoir, j’ai honte d’être là un peu, d’être là trop tard, je ne sais plus s’il est même vraiment venu ici, je suis en cachette un peu, je ne veux pas que les hippies me voient, mais il n’y a personne, puis j’ai honte de ne pas savoir si V. disait ça pour plaisanter ou non, je ne sais sur quel pied danser.
    Anastasie dit :
    et il me dit alors avec l’air plus sérieux(et plus gêné) de ce qui est plus vrai qu'il est mort ce soir à 20h.
    Anastasie dit :
    C'est-à-dire avant que j'arrive.
    Anastasie dit :
    je l'imagine tout décharné
    Johnny dit :
    c'est l'anniversaire, ces jours ci, non?
    Anastasie dit :
    oh!! j'y avais pas pensé!!!
    Anastasie dit :
    et puis là donc, je suis envahie d'une tristesse infinie, comme si elle était autorisée maintenant, ce que je n’osais pas parce que je n’étais sûre de rien, mais là tout était donc vrai, quelle malheur et c’est trop tard, et c’est fini, ou en tout cas j’ai la place que je dois avoir, dans ma vie, je suis là après lui et j’ai le droit et j’ai raison et j’ai raison d’être triste, je suis tellement triste c’est comme un abat d’eau.
    Anastasie dit :
    pour lui d'abord
    Anastasie dit :
    puis pour moi, parce que (et là un souvenir tout frais m’apparaît aussitôt comme si je l’avais bien sûr eu depuis le début du rêve) maman est morte y a si peu de temps ! C’est donc vrai, j’ai tout perdu…
    Anastasie dit :
    Dans ce souvenir, qui est la veille (et est donc visuel puisque c’est un rêve), je la vois très bien dans son cercueil
    Anastasie dit :
    avec un tête très réaliste semblable à celle de manou mais c’est bien tout à fait maman, la vraie, mais morte, pas endormie ni tarabiscotée/transformée en une autre comme les morts de rêves ou de cinema, non, la vraie maman mais morte
    Johnny dit :
    oooohhhhh
    Anastasie dit :
    avec tous les attributs de la mort que j'ai vus pour de vrai, la maigreur, la peau détendue, la bouche…tu sais
    Anastasie dit :
    je fais ça très bien sur maman, lui mettre ces attributs sur la face, ça m’impressionne même dans le rêve
    Anastasie dit :
    et là je suis TELLEMENT TRISTE
    Anastasie dit :
    pour moi, pour mon sort tristissime
    Anastasie dit :
    ils sont mort les deux en si peu de temps
    Anastasie dit :
    et je suis orpheline (je pense le mot plusieurs fois!)
    Anastasie dit :
    et tout ce bonheur a disparu d'une shot
    Anastasie dit :
    sans préavis, tellement indu et inattendu
    Anastasie dit :
    dans un cataclysme
    Anastasie dit :
    et je suis toute seule dans la jungle avec V. qui me regarde
    Anastasie dit :
    dans cette maison labyrinthique de hippie et je suis tellement triste, d’une tristesse simple et légitime parce que c’est un cataclysme.
    Anastasie dit :
    Dans tout ça papa est un peu comme Kurtz dans Au Coeur des Ténèbres de Conrad (et moi un peu Marlow je suppose)
    Anastasie dit :
    tu vois, hein
    Anastasie dit :
    parti fou dans sa retraite, parti se retirer avec sa folie, la mettre à l’épreuve, la vivre pleinement, ou la cacher
    Anastasie dit :
    et finalement mort tout seul dans un échec et agonisant, sans réponses, ou si, je sais pas, non sans réponse, on ne peut que le plaindre tellement, cet échec, cette fin
    Johnny dit :
    petite chose
    Anastasie dit :
    et je pleure pleure pleure
    Anastasie dit :
    Il y a l'angoisse aussi comme dans le livre, y a l'air d'y avoir un mystère autour de cette fin, un truc démoniaque, j’ai peur un peu
    Anastasie dit :
    je ne crois pas totalement V.
    Anastasie dit :
    je ne sais rien et personne ne veut me dire quoi que ce soit
    Anastasie dit :
    sur le séjour de papa et sa mort
    Anastasie dit :
    je suis pas sure qu'il soit mort
    Anastasie dit :
    on ne me propose pas de le voir
    Anastasie dit :
    il n'est juste pas ici.
    Anastasie dit :
    et ce souvenir de maman morte!! Avec tout un tragique autour que mon souvenir effleure, un AUTRE tragique, pas gommé par celui là, juste côte à côtes mais je n’ai pas besoin de m’en souvenir.
    Anastasie dit :
    voilà pour le cauchemar.
    Johnny dit :
    ooohhhhhh
    Johnny dit :
    pirilline
    Johnny dit :
    je suis desolé
    Anastasie dit :
    Au fait, c’est demain, l'anniversaire
    Johnny dit :
    je dois y aller maintenant
    Anastasie dit :
    oui
    Anastasie dit :
    au revoir!
    Johnny dit :
    bisous

  • point

    Je ne peux plus écrire sur ce weblog à cause de la merveille merveilleuse hyper traumatisante New York. Je ne suis pas morte. Etat de choc.





    JE JURE SOLENNELLEMENT FIDELITE A L'UNIVERSITE, LA POESIE, LA PENSEE ET A L'AMOUR.

  • réponse

    Elle a dit:

    ecoute, je crois pas que ton reve a rien a
    voir avec new york. c'etait sans doute plutot lie a tous ces filmes zarbis que
    tu regardes de maniere fanatique!!


    J'avoue j'ai écouté 2 fois 2001 ou l'Odysée de l'espace il y a deux jours, et j'écoute des bouts de Eyes Wide Shut avant de dormir.... y a pas relationnellement plus insécurisant que ce film. Mais de l'Odyssée je ne retrouve rien... l'ouragan, je veux dire par rapport à l'espace, la perspective du plat du vide et du ciel? Non!

    En partant à New York, c'est comme si j'allais affronter un cauchemar pour voir s'il est vrai ou non (ou mauvais rêve), je veux et je ne veux pas, comme dans Mulholland Drive dans l'arrière court du Winkies. C'est une drôle d'expérience intense. Je pars vérifier si c'est un cauchemar ou non, je pars en guerre contre.

    Maman!

    Fuck.

  • paranoïa toujours

    Encore D. et moi prises au piège au fond d'un endroit situé comme le fond de Miramar à Biarritz mais beaucoup plus grand, y avait comme accès à un gymnase immense et bas de plafond sous l'hotel du palais (à cause du danger réel par mer forte), où on était allées (je sais plus pourquoi). J'avais comme d'hab' lot de problèmes relationnels en général, je devais voir Hamza (qui était Zaher) parce qu'il m'en voulait, il y a d'autre gens aussi que je devais voir, Régis peut-être, il y avait des urgences relationnelles, des endroits où j'avais rdv, où je devais aller pour ne pas perdre mes amis, tout en doutant de si déjà j'y serais toujours la bienvenue. Une fête avec des lampions sur des quais? Il y avait Jean aussi, qui voyait de loin mon histoire avec D. et me jugeait. Les gens ne savaient pas à quoi j'étais occupée (préoccupée, dedans), alors ils me jugeaient très sévèrement pour mon manque d'attention et de présence, mon égoisme, mon mutisme, mon ronchonisme. Parce que j'étais tellement préoccupée que je ne parlais pas, n'y allais pas, était comme stupide. C'était désolant mais je n'avais pas le choix, histoire de priorité dans la vie. Ca sentait l'orage, mais pas encore l'ouragan. C'était comme une soirée de feu d'artifice un peu, tout le monde dehors mais comme si les gens avaient été poussés dehors. C'est ça qui faisait l'urgence. Mais moi mon urgence elle était pas là, j'étais un peu anesthésiée aux choses extérieures et incapable d'analyse et maudissant le fait que tout tombe tout en même temps. Evidemment je courrais après D., mais moins au début qu'à la fin, enfin si, au début, mais implicitement, je ne sais plus si elle était avec moi ou pas. Bref on va dans cet endroit (on s'y réfugie?), y avait aussi maman et chloé, mais moi je discute et tergiverse avec D. des heures, en fait, intimité ,un peu, peut-être est-ce ma chambre du Bouscat, je veux la convaincre, je suis un peu désepérée. Mais là encore je fais du forcing, elle ces temps-ci elle est ailleurs, elle a d'autres personnes, elle est occupée, je lui fait l'effet d'un truc qui lui bourdonne désagréablement autour. Mais je réussis un peu à la tourmenter, à la refaire tomber amoureuse de moi un peu. Et puis on sort, et là on voit que tout le monde meurt, que la mer frappe tellement fort comme un jet de pierre, y a plus que du plat d'eau qui brasse des cailloux et fauche les jambes et les arbres, je me dis oh! que tout ce après quoi je courrais la veille au soir, les gens, a disparu. Ou alors sont safe et identiques de l'autre côté (avec les lampions, tout ça) et que c'est ici la fin du monde, que c'est nous qui sommes coincés. On a perdu, avec D. (ou seulement moi) la notion du temps et de l'exterieur, on est piégées et on ne sait pas si c'est juste nous ou tout le monde (s'il faut s'inquiéter pour les autres ou pas). Je suis TERRIFIéE tétanisée mais là encore tellement préoccupée par mon affaire sentimentale que je ne vois rien, je ne fais rien, suis incapable de réagir efficacement, j'ai juste atrocement peur mais de l'interieur aussi, de la fin de l'existence de D. pour moi (ou moi pour elle), je suis partagée entre un fatalisme plein d'effroi "on va mourrir" et un vague espoir que non, mais je ne fais rien. La mer est impressionante de puissance, ce n'est pas le volume d'eau c'est la force des lame qui percutent et dévastent tout comme des jets de plomb. Là où une lame passe elle se retire et plus rien. Il n'y a plus que cette mer devant nous, quelques personnes fuient affolées (seulement là où l'eau n'est pas arrivée, personne ne survit à la lame, à l'horizon le désert...il ne reste que quelques minutes ou des heures, ou la mer n'atteindra pas plus haut ou dans dix secondes la ville sera rasée, on ne sait, je ne sais, j'ai perdu la notion du temps et manqué les évènements je n'ai aucune idée de l'origine ni de la portée, je me réveille dans un cauchemar), d'autres se réfugient dans le gymnase. Que s'est-il passé pendant notre discussion? On se débat un peu, D. a des dessins dans les mains, ses choses qui lui appartiennent et lui rappellent d'autres gens. Elle n'a pas l'air de trouver la situation dramatique, elle est juste saoulée. Elle veut partir, elle n'est pas aux prises avec la même hébétude que moi. Ca la touche moins, sa tête fonctionne normalement. Elle me dit plusieurs phrases embrouillées que je ne comprends pas, finalement je lui dis unpeu au hasard parce qu'il y a des chances que ce soit ça "en fait tu me demandes de te laisser ne pas m'aimer" et elle me dit c'est exatement ça. Ca revient à s'il te plait! fous moi la paix! Elle me supplie un peu ,vu les circonstances elle n'en peut plus. Pendant tout ce temps je m'inquiétais pour maman et chloé mais finalement elles vont bien. Evidemment maman arrive et m'engueule parce que, tout occupée à mes problèmes psychologicorelationels, je fais n'importe quoi en matière ed sécurité et de solution, c'est à dire rien. C'est curieux, en meme temps comme d'habitude elle minimise un peu tout, elle prend les choses en main un peu, elle trouve ça normal, elle veut partir, c'est tout. Elle me trouve bizarre, sent ce qu'il se passe et me juge très sévèrement aussi. Comme quand il s'agit de D., elle désapprouve tellement que je sens un petit "c'est bien fait pour toi". Je l'énerve. Moi j'ai TRES peur en général, c'est la fin du monde pour moi sous tous ses aspects, dedans et dehors, je suis tétanisée à l'idée de ne plus revoir D., et la perdre de vue dans ce chaos signifierait ça. Je ne la lache pas d'une semelle. Mais en même temps c'est faire l'inverse de ce qu'elle m'a demandé, je me sens pitoyable. Mais c'est comme vital, je ne peux pas la perdre de vue; ou je me disloque et je me retrouve aux mains de ces gens et ce monde aux valeurs étrangères où l'amour est ignoré et moqué et je meurs comme un poisson dans l'air. Ils incarnent la négation même de mon monde, il sèment le doute car ils arrivent à vivre: qui aura raison au dernier instant?
    Plus tard dans lerêve, il y a Jean qui arrive en mongolfière (ce n'est pas lui) et qui réchappe du crash à côté de moi et maman, la mongolfière n'a plus que la nacelle et tombe dans un fatras de fils sur la place où on voit la Garonne à Langon.

    Ce matin je suis un peu hébétée, un peu. J'ai retrouvé mes colocs toujours attablés à leur table de poker à 7h. Le décalage est immense.

    Une formule magique contre ces p... de rêves? De désensorcellement?

  • L'Odyssée

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  • le vendeur d'eau de M.

    " Ca c'est drôle en te lisant je m'aperçois que j'ai lu ce tableau d'une manière tout à fait contraire au bon sens. J'ai tellement été happé par la monumentalité du personnage du premier plan que je n'ai pas imaginé une seconde qu'il pût s'agir du vendeur d'eau. C'était donc le fiston du tavernier qui apportait l'eau au vieux brigand ou chevalier errant, débarquant avec sa troupe, un des compagnons buvant de l'eau derrière. La commisération de l'enfant regardant le manteau déchiré ne m'est point apparue. Tout se dessine dans le jeu entre la transparence du verre, la fraicheur de la grande jarre et la cruche bizarrement cabossée, la fraîcheur du jeune garçon et la figure burinée en terre cuite du vieil homme. Et ce qui apparaît mystérieux c'est la rencontre de ces deux âges : de toute évidence il se passe qqchse, le garçon semble éprouver qqchse qu'il ne peut pas tout à fait déterminer. Il ya qqchse de péguy que j'ai lu récemment et qui s'applique bien:

    " Vous, péguy, vous n'avez connu que le vieillard. Vous n'avez point connu le vieux. (...) Vous avez connu la chevelure d'argent, la tête olympienne ; Zeus lui-même ; et la face exactement rasée. Vous avez connu la face de la médaille. Mais vous n'avez pas connu le vieux. (...) Tout ce que les paysans de votre pays, péguy, mettent dans ce mot, un vieux, tout ce qu'il y entendent, tout ce qu'ils y mettent de noueux, de raciné, de ayant résisté, de ayant poussé, de ayant vieilli, de ayant tenu le coup, de ayant passé par n'importe quoi, victorieusement, et pour ainsi dire de ne devant jamais finir, c'est tout cela qu'il faut mettre dans le mot et dire du vieil Hugo : C'était un vieux."

    Le vieux qui a l'air de sortir d'un désert cherche peut être à se désaltérer, et on (et il) ne peut pas ne pas penser à l'innocence et à la fraîcheur correspondante du petit garçon. Il me semblait que le petit se trouve subitement devant le temps, le vieillissement, et c'est ce qui le trouble, mais le fascine en même temps. Quant au vieux, la façon dont il surplombe la scène lui donne l'air de la porter en lui, de l'avoir davantage intériorisée, plus que le gamin qui incline la tête, comme effrayé de ce qu'il entrevoit...
    Ce que tu me dis du tableau me serre le ventre parce qu'effectivement vue comme ça (et comme elle a été voulue par l'artiste je suppose) la scène est très gênante et même pathétique. Mais ce qui est curieux c'est que cette interprétation même si elle me paraît maintenant évidemment la bonne ne détruit pas du tout le premier regard que j'ai eu sur elle. C'est étrange qu'il n'y ait pas d'obstacle pour moi -malgré l'intention évidente de l'artiste- à cet autre regard, alors que la commisération et la fascination, la gêne et la majesté, ce n'est pourtant pas la même chose"

  • Le vendeur d'eau.

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    Ils ne se regardent pas dans les yeux, aucun. Ils n'ont rien à voir, aucun. Tout passe par le verre.

    Qu'est-ce qui passe par le verre?

    D'où vient l'eau qui est sur la jarre? Elle ne peut pas s'être coulée dessus elle même à cet endroit, ni s'en être versé dessus. Si, si elle est trop pleine. Donc, on a une jarre trop pleine pour aller avec le verre très plein.


    Le verre est de luxe, comme le petit garçon, propre.
    Les poignets de la chemise du vendeur sont noircis, son visage tout usé (mais pourquoi ses jarres sont-elles si belles et ventrues? Même la cabossée, on dirait qu'elle l'est de loin, mais de prêt elle est belle ou modelée, pas cabossée).
    Le petit garçon regarde la manche du manteau déchirée, il se mord la lèvre. Le vendeur est gêné il détourne le regard.
    Ou il est aveugle, c'est pour ça qu'il a renversé l'eau, c'est pour ça qu'il regarde droit devant lui.

    Comment tiennent-ils donc ce verre si droit?

    Mais le verre n'a plus d'importance, en fait, rien ne passe par le verre! Il a l'air d'être en position centrale mais ce n'est pas lui. Personne ne le regarde.Tout se croise sur la manche déchirée. Devant elle le verre devient une injure il est trop brillant, propre et plein. En fait il ne l'est pas encore, injure, pour l'instant personne n'y fait attention, tout est dans la manche. Mais dans une minute, quand le petit garçon va remercier et payer, il va avoir honte de son verre. En même temps, il est un enfant, il ne retient pas son regard. Les enfants regardent directement les détails qui les intriguent, ne regardent pas les gens. Il ne se rend pas compte. Mais comment donc l'homme mature regarde-t-il dans le vide? Comment le buriné n'affronte-t-il pas le regard de l'enfant??!?

    Tout passe par le verre: le fait que personne ne le regarde n'est que trop étrange. Ils le tiennent, nettement, fermement, comme une lutte. Aucun ne le lâche. Il s'agit du don. Le vendeur d'eau, le pauvre, le vieux, le sage, DONNE de l'eau, de l'or, donne ce verre trop beau alors qu'il n'a rien, mais ça, ça déborde de sa cruche ventrue. Le pauvre a une cruche ventrue qui déborde. Mais...pourquoi ne sourit-il pas, en ce cas?? peut-être qu'il est juste tanné d'avoir un manteau déchiré.

    MAIS QUE FOUT L'AUTRE DANS LE FOND??

    C'est drôle, il boit, mais dans une choppe à bière. Mais en verre. Il regarde un peu au dessus à gauche.
    Il rappelle que ce dont il s'agit dans tout ça, c'est de boire de l'eau.
    Mais non, c'est justement tout l'inverse, ce qu'il se passe!!
    Il est celui qui a raison, il y a le vendeur d'eau, on achète de l'eau que l'on boit. C'est très simple. Il est dans l'ombre, il représente l'indéfini, la normalité, "je bois de l'eau". Mais pourquoi donc a-t-il l'air triste? C'est que le normal, le pauvre, il ne se rend compte de rien de la fraction de seconde qui couvre l'échange des regards; il boit de l'eau. Il n'a rien compris à la situation. A faire le truc vital, normal, à faire ce dont il s'agit, ce dont il devrait s'agir, il est tout seul. Car il ne s'agit jamais de ça. Il se passe tout un monde dans l'évènement-prétexte, un monde qui n'a rien à voir avec, pauvre lui qui y est extérieur, un "je bois de l'eau".
    Les deux autres, ceux qui sont dans le monde et qui ouvrent la situation, ils sont très caractérisés.
    Bref.

    Johnny vient de me dire: les visage font un mouvement circulaire, qui va de l'enfance à la vieillesse, le temps de vider sa choppe et le tour est passé. Tout se rejoint!
    Johnny vient de me dire: on dirait un forçat, un maudit, un condamné à servir (et même renverser) de l'eau de jarres ventrues sans pouvoir jamais boire, alors qu'il a un manteau de saint-françois au désert assoifé, il n'a plus d'yeux, le maudit.
    Pour celà M. a raison: on dirait qu'il surplombe la scène, du surplomb de celui qui sait qu'il est soumis à la nécessité, celui du forçat, du damné, fort tout de même, celui que les épreuves ont patiné et non usé. Il l'a déjà vécu, cette scène, ce regard humain 1000 fois. Il y est aveugle comme Zeus est aveugle aux accidents.