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  • par où

    Elle se lasse autour de mes pieds et délasse mes pas, les enlève

    à la marche du fleuve.

    Tous conviennent de dire que c'est ce qu'il faut, comme ordre, se donner et suivre.

    Mais pas par où.

    Avec nos monstres sur nos talons,

    et le néon du centre de la pièce qui rugit à notre place,

    on ne pense qu'à partir, mais pas par où.

  • Coffrée

    Je me suis coffrée, hein, c'est ça que j'ai fait.

    Ici, tout est noir, tendre et sourd, calciné dans la lumière changeante.

    Le sol spongieux sent le corail bouilli, la muqueuse rôtie au soleil.

    Il ne faut pas se leurer, cet isolement, c'est pour que puisse continuer à battre le coeur.

    Sans echo

    Sans menaces

    Sans menaces des objets pointus, des coins de la pièce,

    ni de la mer, ni des passants.

    Moi, avec mon coffre noir, je ne crains plus les passants.

    Avec mon écrain sans issue, je vis dans un monde où meurt le jugement,

    à la manière dont un grand prédateur suffoque sur une terre sans proie.

    Ainsi, les DENTS DU JUGEMENT CLAQUENT DANS LE VIDE.

    Calfeutrée au sein de mousses vénéneuses,

    dans un espace clôt où la lumière ne s'allume que pour noyer les bruits,

    et les bruits ne résonnent qu'en tombant dans un gouffre noir.

    Ceux, constants, du coeur, à la chaleur de poix,

    Ceux, fluctuants, du sang à la coulée de plomb.

    Pour le reste, les êtres pénètrent et passent dans des vapeurs de goudron, et actionnent la pompe habituelle, la pompe à musique, la pompe à paroles au son cristallin.

    C'est dans cet environnement que se passeront peut-être, avec l'habitude, les rires d'enfant.

  • éh, poupée!

    Elie pénètre à l'intérieur par une petite porte située au niveau de la cheville droite de la gigantesque repique de lui-même qu'il a trouvée sur son chemin lui barrant la route, un jour qu'il marchait sans but sur une voie rectiligne.

    Lorsqu'il passe le seuil, tout se met à trembler. La voûte, très haute, semble de plâtre, qui tombe maintenant par pans entiers. Les morceaux et craquelures suivent les dessins de pauses passées.

    Elie a envie de tâter la substance des murs, qui à y regarder de plus près semble de facture organique. Il se rend compte avec émotion que cette paroi aurait pu être chair si on l'avait, une fois venue au monde, hydratée, abreuvée comme elle le demandait.

    Mais maintenant il est trop tard, et cette chair devenue ciment s'éboule comme elle coulerait des larmes, donc chacune irait rouler au fond du gouffre noir avec les cailloux, les graviers, restes d'organes vitaux eux aussi calcifiés - il y aurait de quoi dresser ici un mémorial Hautement Honorable et Respecté. 

    La belle langue suspendue elle aussi s'est tristement asséchée du Verbe, ses belles différences ratatinées jusqu'aux bornes de l'indistinction. Ainsi, si l'on ne peut s'attendre à rien de bon, cela ne prendra au moins que la forme d'une lente indifférence. Et aucun cri d'alarme ne se fait entendre, simplement les chuchotements des derniers ouvriers, ces quelques fidèles raboteurs de crypte cérébrale qui viennent chaque jour à l'ouvrage même sachant que rien n'en sortira plus. Ils l'accomplissent d'ailleurs aujourd'hui fort mal, avec précipitation, sentant le péril de cette voûte instable. Ils ne vont pas tarder à partir, fermant définitivement la porte sur l'effondrement final, ne pouvant plus grand chose contre le bris des jointures, la fente des soudures et le reste, bref cet assourdissant concert de gémissement de matière. En bas, le roulement du gravier se poursuit et lave jusqu'à la plus fine poudre des restes de vie, ne laissant là que de beaux et durs galets au son clair.

     

    Il dit que la métaphysique lui manque, moi je dis que la religion, celle qui ne s'arrête pas aux pieds de l'individu et à sa propre pédicure personnelle, est absolument absente de l'atmosphère, du bouillon que boivent les gens chaque jour.

  • Pas de nouvelles

    Je vais mieux, je boue d'une colère noire sans la tourner contre moi. J'ai un chaudron de poix pâteuse à la place de la tête et n'ai plus le temps de développer les questions au dessous de "je suis qui bordel" ni quoi que ce soit d'autre mais je suis heureuse d'être en colère car je ne suis donc pas encore la brindille sèche que je pensais être en passe de devenir.

    Mais tout de même, je ne sais pas si ce que j'aime je l'aime vraiment, si je l'aime pour de bonnes ou de mauvaises raisons, si c'est la bonne ou la mauvaise partie de moi qui l'aime ni à partir de quelle proportion (de bonne ou de mauvaise partie) on décide que c'est nous, vraiment.  Ni à partir de quand est-ce que je peux décider que j'ai toujours été ce que je suis.